Le problème des prixIl est très simple : les consommateurs veulent payer moins cher pour les versions numériques, les éditeurs veulent préserver leur métier et donc leurs marges, et les auteurs ne veulent pas être les dindons de la farce. La tentation est donc forte pour des géants comme Amazon, Apple, et bientôt Google de contourner les éditeurs, qui empêchent la baisse des prix. Comme on l’a vu il y a peu avec l’affaire Andrew Wylie (voir plus bas) , ce type de bras de fer n’en est qu’à ses débuts. En effet, les auteurs ne comprennent pas que les éditeurs touchent le gros du pactole sur le numérique aussi, alors qu’il n’y a pas le même travail de promotion, pas d’impression, pas de transport, etc…et les éditeurs estiment que le travail sur le texte (mise en pages, correction, etc…) mérite salaire. Blocage donc ! |
Amazon sort des sentiers battus….Amazon a du céder sous le coup porté par Apple qui a proposé un modèle dans lequel ce sont les éditeurs qui fixent les prix, mais a depuis préparé la contre-attaque. Amazon a par exemple demandé aux autres éditeurs (ceux qui n’ont pas signé pour le modèle d’agence) d’être plus ambitieux et de saisir leur chance avec des prix plus bas.
Autre exemple, le bras de fer qui oppose actuellement Andrew Wylie et la maison d’édition Random House. Un précédent historique, qui montre qu’à l’ère du numérique, la place de l’éditeur est réellement remise en question par certains. L’agent de plusieurs ‘stars’ américaines de la littérature a passé un accord avec Amazon pour vendre en exclusivité certains titres en version numérique, sans demander son avis à l’éditeur.
Il y a aussi le Kindle Store Anglais, qui montre aussi que la nouvelle stratégie se déploie, puisque sur certains ebooks, les prix se sont écroulés, passant pour certains de 12,99 $ à 4,40 $. Amazon a en effet annoncé que pour le Kindle Store Anglais, ce ne seraient pas les éditeurs qui fixeront les prix. Et nouveau bras de fer…
Autre approche enfin : Amazon a mis en place des outils qui permettent de mettre en ligne soi-même ses livres numériques, et de toucher jusqu’à 70% de commission sur les ventes. L’approche a été reprise depuis par l’ensemble des concurrents. Et ce qui est très révélateur, c’est que ces plateformes pas seulement ouvertes aux éditeurs….
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Le modèle d’agence illégal ?Une enquête est en cours, car la justice américaine s’inquiète d’une éventuelle entente sur les prix des livres numériques. Or, on sait que cette entente existe puisque le modèle d’agence est par nature une fixation unilatérale des prix. Amazon et Apple ont donc tous deux été convoqués pour répondre de cette accusation d’entente. Amazon, qui avait du céder sur les prix face à la pression jouera sûrement la revanche et facilitera bien sûr l’arrêt de ce système qu’il subit depuis le départ. Et de toute manière, Avril marquera la fin de la période de modèle d’agence pour laquelle Apple a signé (une sorte d’essai renouvelable…ou pas). Une date que certains analystes considèrent comme celle où le piège Apple se refermera sur les éditeurs, alors habitués à la plateforme.. |
Et en France, quel avenir pour Kindle ?C’est loin d’être gagné, et pour l’instant, la situation est comme je le disais au blocage. Avec un projet de loi en septembre pour un prix unique du livre numérique qui sera a priori inapplicable (il suffira de proposer une version ebook différente ou pas de version papier pour ne pas être concerné), et qui veut « aligner » prix du livre papier et numérique, on voit mal comment Amazon pourrait négocier avec les maisons d’édition Françaises.
En dehors d’une prévisible explosion du piratage, une stratégie de la part de Kindle, Apple et les autres pour recruter directement les auteurs sera sûrement d’actualité. Je crois aussi que des maisons d’édition alternatives, plus petites, et plus flexibles sur les prix, vont fleurir sur cet espace si il est laissé vide.
On devrait aussi beaucoup lire Francophone, car cela est l’occasion pour de nombreuses maisons d’édition (par exemple Québécoises) de se faire connaître.
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Les jeux sont-ils déjà faits…?D’un côté des maisons d’édition qui veulent garder des prix 2 à 3 x supérieurs à ceux que le consommateur réclame, de l’autre des consommateurs prêts à tout pour avoir des produits à très bas prix (dont à pirater massivement), et enfin, des intermédiaires qui veulent donner accès à des bas prix aux consommateurs. D’après moi, tout cela ne peut évoluer que dans le sens du consommateur. J’en ai déjà parlé dans : « Prix des ebooks : l’offre et la demande décideront ! » Mais en route, il est possible que les cartes soient redistribuées, surtout si les grandes maisons d’édition n’arrivent pas à trouver de nouveaux modèles. En effet, de nouveaux acteurs sont justement prêts à négocier avec les géants d’internet, à vendre moins cher et à donner plus de commissions aux auteurs. Des concurrents que l’édition n’a pas vu arriver…. Et pendant ce temps, le rôle d’Amazon est simple : souffler sur le feu…. |