Les distributeurs américains deviendront-ils éditeurs ?

La prochaine étape pour Apple, Amazon, Google…?

En pleine loi sur le livre numérique, alors que le contrat d’agence aux Etats-Unis, et le prix unique en France viennent empêcher Amazon, Google, Apple et leurs « amis » de venir casser les prix, n’est-on pas en train de pousser les puissants acteurs de la distribution à se poser en concurrents des éditeurs ?

Dans la guerre qui oppose les distributeurs et les éditeurs sur le livre numérique, il semble que les éditeurs tiennent bon, et que les distributeurs vont devoir abandonner leurs intentions de casser les prix.

Mais alors que les éditeurs bloquent les prix, les distributeurs pourraient être tentés de résoudre le problème en proposant une partie des services des éditeurs, tout en rémunérant mieux les auteurs.

L’exemple Amanda Hocking

Amanda Hocking est devenue une star sur Amazon après avoir utilisé la plateforme de publication de la marque. Inconnue au départ, elle a vendu depuis plus de 100.000 exemplaires par mois de son ouvrage, tout en touchant 70% du prix de vente, grâce à des prix bas (0,99 à 3 $) qui lui auront permis de se faire connaître et de toucher un vaste public.

Amanda Hocking vient donc d’être abordée par des éditeurs, conscients d’avoir là une auteure à fort potentiel, et avec 8 ouvrages en stock.

Mais comme l’explique Actualitté, Amazon ne l’a pas entendu de cette manière et viendrait donc de sortir son carnet de chèques pour récupérer la demoiselle si prometteuse. Pour le papier, Barnes & Noble aurait donc la primeur, alors que pour le numérique, Amazon garderait la main.

Les distributeurs vont-ils aussi devenir éditeurs ?

Pas au sens strict, bien sûr, car un des rôles de l’éditeur est de diffuser l’ouvrage au maximum, ce qui ne serait pas le cas ici. Mais pour l’auteur, un des rôles principaux d’un éditeur est de lui faire gagner de l’argent. Ce rôle pourrait très être joué par les distributeurs, dont les possibilités de promotion sur internet sont sans commune mesure.

Amazon vient pour la première fois de rattraper un auteur, mais n’en est pas à son coup d’essai, qu’il s’agisse de contacts avec des agents, ou des exclusivités Amazon. Même si dans ce cas l’acteur ne joue pas le rôle d’un éditeur dans le sens où un éditeur l’entendrait, il sort de son rôle de simple distributeur.

Et c’est peut-être un glissement significatif…

Les plateformes de publication des différents acteurs (tous ont la leur) sont en effet toutes capables de permettre la découverte de talents, tout en utilisant une grille tarifaire qui incite à proposer des prix très bas pour obtenir une très forte commission. Comme on le voit avec l’exemple Amanda Hocking, en cas de Best-Seller, c’est le jackpot assuré.

Et à l’heure où les éditeurs (ou en tout cas les grands éditeurs) veulent faire front face à la menace que les géants de l’internet font peser sur leur modèle économique, il sera très difficile pour les distributeurs de dérouler leur stratégie de prix bas. Comme ils ne peuvent pas atteindre leurs objectifs à long terme autrement, il ne leur reste qu’une solution : contourner le problème, et donc les éditeurs qui s’opposent à eux, entre autres en faisant monter ces plateformes en puissance.

On peut donc imaginer qu’ils en viennent à surveiller avec attention leurs propres plateformes, pour ensuite « signer » les auteurs les plus prometteurs, en leur offrant la visibilité, les contrats, les ventes et les commissions nécessaires pour les garder.

Bref, il semble désormais très probable que les distributeurs cherchent à contourner toute la chaîne du livre pour ne plus traiter qu’avec les auteurs et leurs agents. Et même si cela ne fera peut-être pas d’eux des éditeurs dans le sens traditionnel du terme, ils ne devraient pas avoir trop de mal à construire leur propre catalogue, dont cette fois-ci, ils contrôleront les prix.